Concert Les Beaux Dimanches - Vicq sur Gartempe12 mars 2023

 Programme :

Mél BONIS Suite en trio (arr. pour flûte,alto et harpe)

Claude DEBUSSY Sonate pour pour flûte, alto et harpe

Toru TAKEMITSU An then, I knew t'was wind

Arnold BAX Trio élégiaque

Maurice RAVEL Sonatine (arr. pour flûte, alto et harpe)

Astor PAZZIOLA Les Saisons (arr. pour flûte,alto et harpe) 

 

Avec ce programme aux multiples influences, de la France à l’Argentine, en passant par l’Angleterre ou le Japon, le Trio Moïra, vainqueur du concours de musique de chambre de la FNAPEC en 2022, offre au public un voyage à travers le temps et l’histoire de la musique et lui fait découvrir le répertoire de cette formation atypique réunissant une flûte, un alto et une harpe. Imaginé par Claude Debussy, cet heureux mariage de timbres offre une saisissante et évocatrice palette de sonorités qui a fait le bonheur de nombreux compositeurs comme Arnold Bax ou Toru Takemitsu et qui permet, au travers d’arrangements originaux, de découvrir sous un jour nouveau des chefs d’œuvre du répertoire, comme la Sonatine pour piano de Maurice Ravel, ou des œuvres injustement méconnues, comme la subtile Suite en trio de Mel Bonis. Enfin, une incursion à Buenos Aires chez le grand Astor Piazzolla qui, après des études de composition au Conservatoire de Paris, rentre en Argentine et devient le maître du tango nuevo, permettra de goûter à cette musique sud-américaine ô combien puissante et expressive.


Claude Debussy : Sonate pour flûte, alto et harpe
Claude Debussy : Sonate pour flûte, alto et harpe


Mel BONIS (Paris, 1858 – Sarcelles, 1937)

Suite en trio, pour flûte, violon, piano, op. 59, 1903 (éd. Demetz) (arrangement pour flûte,alto et harpe)

 

            Élève notamment de César Franck et de Charles Koechlin, Mel Bonis fait partie, à partir du début du XXe siècle, des artistes les plus avant-gardistes en France. Même si elle ne côtoie pas beaucoup de compositeurs contemporains, son style s'apparente à celui de l'un de ses maîtres, Gabriel Fauré, ainsi qu'à d'autres compositeurs comme Franck et Debussy. Elle joue aussi un rôle de pédagogue, notamment auprès des enfants. 

            Elle compose environ deux cents œuvres tout au long de sa vie : surtout pour piano, petits ensembles instrumentaux et quelques œuvres pour orchestre. Intégrée dans la vie mondaine parisienne, coutumière des salons, elle pioche dans les œuvres littéraires de ses proches la matière de ses mélodies. 

            Dans les années 1990, elle est redécouverte par les musicologues allemands Eberhard et Ingrid Mayer et son arrière-petite-fille, Christine Géliot, tâche de faire revivre, avec l'aide de l'Ensemble Mel Bonis, l'œuvre de son aïeule. 

 

La Suite en Trio comporte 3 mouvements :

1.     Sérénade

2.     Pastorale

3.     Scherzo

4.      

Elle est dédiée à Charles Malherbe (1853-1911), violoniste, musicologue, compositeur, éditeur de musique et bibliothécaire de l'Opéra de Paris.

 

Claude DEBUSSY (Saint-Germain-en-Laye, 1862 – Paris, 1918)

Sonate pour flûte, alto et harpe, en fa majeur, 1915

 

1.     Pastorale

2.     Interlude (Tempo du Minuetto)

3.     Finale

 

            Trois sonates instrumentales ont été écrites entre 1915 et 1917 par Debussy, incité par l'éditeur Jacques Durand à sortir de la claustration dans laquelle il vivait depuis le début de la Première Guerre mondiale. Il envisagea d'en composer six, pour divers instruments, dans l'esprit de la sonate préclassique et en hommage aux maîtres français du XVIIIe siècle. Mais la mort l'empêcha de réaliser entièrement son projet.

            D'abord destinée à la flûte, au hautbois et à la harpe, cette Sonate doit à son instrumentation définitive, l'alto remplaçant le hautbois, son caractère « affreusement mélancolique […] Je ne sais pas si l'on doit en rire ou en pleurer, peut-être les deux ? ». Les timbres des trois instruments se marient admirablement, alliant liberté du propos et de la structure, lyrisme et sensualité.

 

 

Tōru Takemitsu (Tokyo, 1930 – Tokyo, 1996)

An then, I knew t'was wind (Et puis, j'ai su que c'était du vent) (1992)

 

            Tōru Takemitsu découvre la musique occidentale durant la seconde guerre mondiale, et se passionne dès lors pour la musique française (Debussy, Satie et Messiaen) ; il étudie la composition avec Yasuji Kiyose en 1948. La musique de Kiyose intègre parfois des gammes pentatoniques japonaises et d'autres éléments du répertoire traditionnel japonais, et Takemitsu, plus encore que son maître, développe cette tendance dans un grand nombre de ses propres œuvres : style musical, emploi d'instruments traditionnels, référence à la nature. Souvent considéré comme un « pont » entre les cultures japonaise et occidentale (rôle qu'il n'a pourtant jamais désiré jouer), il semble que Takemitsu désirait bien davantage dépasser la vieille opposition Orient-Occident pour aboutir à une universalisation de toutes les cultures, sans réelles démarcations entre elles. 

            Composée en 1992, cette œuvre appartient à la dernière période de la production créative de Takemitsu, et donne libre cours à ce qu'il appelait le « romantisme » : les techniques modernistes semi-sérielles se détendent, la musique a une vision résolument positive de la « mer de tonalité » qu'il a développée dans les années 1980. Son langage musical se stabilise et se normalise au point que les pièces de son « jardin » musical se ressemblent de plus en plus, partagent souvent des matériaux thématiques musicaux et sémantiques (le vent, l'eau) ou font des allusions à d'autres compositeurs : il inclut également une brève citation de la sonate de Debussy pour flûte, alto et harpe qui a servi de modèle pour cette composition. 

Arnold BAX (Streatham, banlieue londonienne, 1883 – Cork, Irlande, 1953)

Trio élégiaque (1915)

 

            Avant d'aborder l'orchestre, Bax compose pour le piano et pour la voix, et trouve du côté de Schumann et de Chopin ses premiers modèles. Tchaïkovski, Wagner et Richard Strauss l'influencent ensuite, notamment pour leur technique d'écriture. Il étudie l'orchestration de Debussy, Ravel,  Stravinsky et Sibelius. Bax synthétise tous ces apports pour créer un style personnel très identifiable, marqué aussi par l'Irlande, ses paysages, la mer, les autochtones et la musique populaire celtique.

            Sa musique est fortement enracinée dans le courant néoromantique post-wagnérien tempéré par des éléments impressionnistes. Il se définit lui-même comme un « romantique sans honte » : « Ma musique est l'expression d'un état émotionnel. Je ne suis pas intéressé par le son musical en lui-même ».

            Le Trio élégiaque est peut-être l'œuvre de chambre la plus populaire de Bax et fait partie d'une poignée de compositions, dont In Memoriam (An Irish Elegy) composée presque directement après l'échec de l'Insurrection de Pâques, entreprise par les mouvements républicains qui comptaient sur un soutien populaire qui ne se manifestera pas (1916).

 

Maurice Ravel (1875, Ciboure – 1837, Paris)

Sonatine (arrangement pour flûte, alto et harpe) 1903-1905

 

1.     Modéré

2.     Mouvement de menuet

3.     Animé

4.      

            Cette Sonatine écrite pour piano se caractérise par sa concision, la finesse de l'écriture, et le classicisme de la forme, qui renoue avec un genre en faveur à la fin du XVIIIe siècle

            Au premier mouvement Modéré, d'une écriture limpide, succède un Menuet très bref, « lent mais allant », avec « une grande rigueur de rythme », selon les indications du compositeur. Le dernier mouvement, Animé, en style de toccata alerte, avec la même énergie rythmique, se rapproche d'un mouvement perpétuel. 

 

Astor Piazzolla (Mar del Plata, 1921 - Buenos Aires, 1992)

Les Saisons (arrangement pour flûte, alto et harpe) 

 

            Piazzolla commence sa carrière musicale comme bandéoniste et joue dans divers orchestres argentins. Au début des années 1950, il pense sérieusement à abandonner le tango pour se consacrer à une carrière de compositeur de musique savante et s'éloigner ainsi du tango, musique populaire. Il reçoit le premier prix de composition Fabien-Sevitzky et une bourse pour étudier à Paris, cesser d'être un tanguero. Installé à Paris en 1954, il commence par présenter à Nadia Boulanger au piano ses différentes compositions classiques. Elle discerne immédiatement les différentes traces de Bach, Ravel, Stravinsky, Bartók et Hindemith, mais affirme ne pas entendre la musique de Piazzolla. Ce dernier, honteux de jouer du tango devant elle, lui présente finalement une de ses œuvres de tango au bandonéon. « Ceci est votre musique, vous pouvez jeter le reste », s'exclame Nadia Boulanger après seulement quelques minutes. Jusqu’alors tiraillé entre la musique de son héritage argentin et son désir de devenir un compositeur sérieux d’œuvres modernes et complexes, Piazzolla comprend finalement que l’un ne doit pas exclure l’autre, qu'on peut utiliser les musiques populaires comme un inépuisable vivier d'idées, tout en l'enrichissant d'un langage évolué et contemporain. 

            Ainsi naît l'esprit du tango nuevo, mélange des rythmes du tango traditionnel et du jazz, expansion du tango par le dialogue entre les différents courants musicaux de l’époque. Cette musique novatrice est alors perçue, en Argentine et à l'international, comme une représentation symbolique d'une nouvelle Argentine avec un nouveau son et une nouvelle identité culturelle, moderne et ouverte.

            Les Saisons regroupent quatre compositions de tango écrites entre 1965 et 1970. Conçues et traitées originellement comme des compositions différentes plutôt que comme une suite, elles ont finalement été publiées dans différents albums, et écrites d'abord pour un quintette avec violon, piano, guitare électrique, contrebasse et bandonéon, puis différentes instrumentations. 

            Il s'agit de différentes périodes de la vie précaire d'un habitant des bidonvilles de Buenos Aires

1.   Verano Porteño (été) composé en 1965. 

2.   Otoño Porteño (automne) 1969.

3.   Primavera Porteña (printemps) 1970.

4.   Invierno Porteño (hiver) 1970.

 


Le Trio MOÏRA - Les Beaux Dimanches 2023 - Vicq sur Gartempe  © François Bigot